Dès les premières pages du livre, l'accent est mis sur un chien qui aboie inlassablement, près de la prison militaire où son maître est incarcéré :
A une heure de l'après-midi, avec la chaleur qui écrasait la ville, les hurlements du chien étaient insupportables. Il était là depuis deux jours, sur la place Michelet, et depuis deux jours, il aboyait. C'était un gros chien marron à poils courts, sans collier, avec une oreille déchirée. Il jappait méthodiquement, une fois toutes les trois secondes à peu près, d'une voix grave qui rendait fou.
Nous sommes en 1919, dans un petit village du Berry. C'est l'été et un juge se présente pour rencontrer Jacques Morlac, le propriétaire du chien. Une première entrevue au cours de laquelle le prisonnier se montre peu loquace. Son cas semble sortir de l'ordinaire. Décoré de la Légion d'honneur pour acte de bravoure durant la guerre, rien ne le prédestinait à se retrouver en prison. Pourquoi est-il résigné à son sort ? L'homme de loi va prendre son temps, écouter, parler, enquêter, retrouver une femme que le détenu a aimée et peu à peu démêler les fils de l'histoire, une histoire à laquelle le chien n'est pas étranger :
Le juge avait très mal dormi. Un groupe de fêtards avait braillé sous sa fenêtre au milieu de la nuit et il n'avait pas pu trouver le sommeil ensuite. Il pensait à ce Morlac, à son refus de saisir les perches qu'il lui avait tendues. Pourquoi n'acceptait-il pas de dire qu'il était ivre ? Pourquoi ne pas avouer qu'il nourrissait une véritable passion pour son chien et que cela lui avait fait perdre un instant la tête ? Il écoperait d'une peine légère et on n'en parlerait plus.
Un magnifique roman, servi par une écriture fluide. Un récit dépouillé et fort, dans lequel l'auteur, qui s'est inspiré d'un fait réel, souligne l'absurdité de la guerre.
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